Voler en parapente avec les rapaces, c’est un peu comme naviguer avec des dauphins qui jouent à l’étrave du voilier!
C’est de la magie pure, le temps reste suspendu, plus rien n’existe d’autre que le regard de ces maestros des cimes. Le rapace n’est plus une silhouette; à quelques mètres de moi, chaque plume du volatile semble prendre vie, je pourrais presque tendre le bras pour le toucher. Pourtant sous nos pieds, sous nos pattes, c’est le vide. 2000 mètres nous séparent du premier rocher, du premier arbre, notre lien, c’est l’invisible; l’ascendance thermique, qui nous fait danser, dessiner des cercles dans le firmament. L’objectif; prendre de l’altitude, le ticket gagnant pour un long vol plané, du bonus, pour aller plus loin. Pour l’un, aller plus loin pour vibrer en côtoyant les nuages et ses habitants. Pour l’autre, repérer un proie, une carcasse, survivre. Mais pour ces êtres qui peuplent le ciel de la planète, le plaisir de voler existe. Voler, nous plonge dans une ivresse.... Les hommes et les oiseaux unis dans cette même passion, dans cette même addiction.
J’observe les oiseaux depuis l’âge de 11 ans. Je ne part jamais en voyage, sans emporter le guide d’identification ornithologique de la zone géographique explorée. Très souvent, j’ai la chance de prendre de la hauteur sous mon parapente. C’est une magnifique opportunité, pour rencontrer des oiseaux, sous un cumulus, au sommet d’une montagne. L’ornithologue est souvent frustré par la distance qui le sépare de l’oiseau planeur qui voyage de thermique en thermique, sa longue vue lui permet peut-être de l’identifier, mais c’est souvent à peine une mouche dans l’oculaire. Observer les oiseaux en vol libre, c’est partager un élément, et établir un dialogue avec eux. Il y a parfois du snobisme de leur part, souvent de la curiosité et extrêmement rarement de l’agressivité.
Depuis plus de 20 ans, aux quatre coins de la planète, j’ai pu observer en vol, souvent à quelques mètres, des dizaines d’espèces différentes de rapaces, des cigognes,
Certaines destinations sont des perles rares pour ces rencontres du troisième type: l’Himalaya, l’Ethiopie, où de fortes densités de rapaces, et une grande diversité d’espèces rendent chaque vol extraordinaire.
Bien sûr plusieurs aventures restent particulièrement gravés dans ma mémoire:
En Tanzanie, durant un vol thermique sur la vallée du rift, entre le parc National du Serengeti et le parc national du Ngorongoro, le long du lac Natron, des centaines de pélican blanc ( white pelican), de tantale ibis( yellow billed stork), de cigogne à bec ouvert ( open-bill stork), de Marabout ( Marabou stork), me rejoignent dans l’ascendance au milieu d’ aigles ravisseur (tawny eagle), aigles de verreaux
( Verreaux’s eagle) et de vautour de Rüppel ( Ruppel vulture). A quelques kilomètres, le volcan Ol Doinyo Lengai est en éruption...
En Patagonie, durant un vol cross entre El Bolson et Bariloche, un condor perché sur une corniche décolle sous mes pieds pour enroulé en concert dans un petit thermique . En contre bas les lac émeraudes, m’appellent! Je poserai au bout de quelques heures et 80km parcouru, pour me jeter dans l’eau cristalline à peine décroché de ma sellette!
Cet automne, je suis parti au Nepal et malgré l’urbanisation galopante dans les campagnes, les rapaces étaient bien présent. Ces photos illustrent mes dernières rencontres. En octobre-novembre, des milliers d’Aigle de Steppes transitent depuis leur aires de nidifications en Asie centrale sur les avant relief de l’Himalaya en direction de leur quartier d’hiver, et j’ai pu enrouler au milieux de dizaines d’aigles simultanément. Les vautours de l’ Himalaya sont de vrais compagnons, extrêmement curieux, ils se plaisent à surfer le bord d’attaque de mon aile, à nous suivre parfois de thermiques en thermiques sur plusieurs transitions. Parfois un aigle noir, un aigle de Bonelli, un aigle serpentaire croisent mon chemin.
Ainsi Parapente et ornithologie peuvent être de précieux alliés!